La CSRD : l’avenir au-delà du reporting

La CSRD n’est-elle qu’une couche de plus dans le fardeau administratif qui pèse sur les entreprises ?
On pourrait le penser lorsqu’on se penche sur les textes des directives ESRS, et lorsqu’on ouvre le fichier Excel de l’EFRAG avec ses (plus de) mille data points déclinés en autant de lignes à renseigner…

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L’application de la directive va nécessiter un travail important, et une gestion de projet rigoureuse. Les grands groupes cotés ont eu plus de 20 ans pour organiser leur démarche de reporting ESG, depuis la loi NRE, et à travers les différentes évolutions réglementaires. La marche que représente la CSRD est conséquente, mais ces grandes entreprises ont déjà des équipes dédiées et des systèmes d’information robustes. En revanche pour les PME/ETI qui vont se livrer à cet exercice prochainement (exercice 2025 publié en 2026 pour les entreprises de 250 à 500 salariés), c’est une autre histoire ! Elles redoutent le coût généré par la complexité du sujet, qui les détourne de leur cœur de métier. Et bien souvent elles n’ont pas les compétences en interne.

Leurs représentants par la voie de la CPME plaident ainsi pour :

  • Une mise en cohérence avec les dispositifs environnementaux existants : rendre plus lisible le maquis de dispositifs existants, et veiller à l’homogénéité des exigences. A noter : par exemple dans le domaine social, il sera nécessaire de communiquer sur l’égalité H/F…mais faudra-t-il présenter un calcul similaire ou différent de celui qui existe déjà dans la loi française (l’index d’égalité professionnelle) ?
  • Un développement d’outils opérationnels, faciles d’usage et gratuits, des financements, des accompagnements adaptés et des formations.

De plus,  dans la mesure où la CSRD nécessite d’analyser la chaîne de valeur, il est probable que l’onde de choc CSRD s’étende au-delà du périmètre des seuils officiels. Une PME de 100 salariés qui travaille en BtoB et répond à des appels d’offre d’entreprises soumises à la CSRD, devra être en mesure de répondre aux questions de durabilité que ne manquera pas de poser le donneur d’ordres.

Or, d’après une enquête réalisée par la CPME fin 2023 auprès de 1418 dirigeants, seulement 13 % d’entre eux ont connaissance des exigences de la CSRD… Il y a donc du chemin à parcourir !

Au-delà des contraintes liées au caractère réglementaire de cette directive, il est important d’en dégager des opportunités. Considérer la CSRD sous le seul angle du reporting obligatoire est à coup sûr le meilleur moyen de le subir dans la douleur.  Le reporting n’est que la face émergée d’une démarche engageant toute l’entreprise dans un changement structurel qui peut être bénéfique, à condition de s’en emparer sérieusement et avec méthode.

La CSRD peut ainsi permettre de :

  • Réinterroger son contexte stratégique et son modèle d’affaires, avec un objectif de pérennité et d’amélioration de la performance, en intégrant les risques de durabilité impactant l’entreprise : cela peut contribuer à sécuriser sa chaîne de valeur et ses approvisionnements par exemple. C’est la continuité de l’activité qui est en jeu.
  • Identifier les impacts des activités de l’entreprise sur l’environnement et adapter sa politique de développement durable et responsable, dans une perspective de création de valeur à long terme : préserver les ressources et la bonne santé de la planète et de ses habitants, c’est investir pour l’avenir.
  • Améliorer sa réputation et son image, gagner la confiance des marchés d’affaires et des investisseurs, faciliter l’accès au financement : la taxonomie européenne s’inscrit déjà dans cette logique, mais au-delà, la transparence sur les données de durabilité risque d’avoir un impact structurant sur les marchés économiques. Le dernier baromètre « ODD et entreprises françaises en action » (Pacte Mondial et PWC , 2023 ) souligne ainsi l’attention que portent les parties prenantes de l’entreprise au respect des objectifs de développement durable : les clients en premier lieu, puis les salariés et les financeurs.
  • Favoriser l’innovation et les partenariats avec les différentes parties prenantes : fournisseurs, clients, salariés, associations…
  • Améliorer l’engagement des équipes dans un projet collectif.

Sur ce dernier point, la CSRD est véritablement un projet transversal qui va ainsi nécessiter l’implication à des degrés divers :

  • de la direction générale,
  • de la direction financière,
  • de la direction RSE ou développement durable
  • de la direction des risques,
  • de la DSI,
  • mais aussi des achats, de la production, des ressources humaines….
  • et des parties prenantes externes (partenaires, clients et fournisseurs, experts sectoriels…).

C’est donc toute l’organisation qui va être impactée. Et pour cela soit bénéfique, il faut évidemment proportionner les efforts aux enjeux, et donner du sens à la stratégie de durabilité. Ce n’est pas un sujet à part, c’est intégré à la stratégie globale de l’entreprise : quels sont les objectifs, comment les atteindre, et comment mettre en cohérence les actions opérationnelles au quotidien ?

En définitive , la finalité de la CSRD, ce n’est pas seulement contraindre les entreprises à produire de la donnée, c’est aussi et surtout les pousser à préparer l’avenir.